L'exécuteur défie l'empire du kung fu (1982)

J'ai découvert L'exécuteur défie l'empire du kung fu grâce à l'éditeur Bach Films et sa collection intitulée Kung Fu Masters reconnaissable à ses jaquettes jaunes et à son slogan annonçant fièrement "35 chefs d’œuvre des Arts Martiaux" (qui se sont révélés en fait des séries B, voire C... et même D pas toujours indispensables mais pourquoi pas). Plusieurs de ces DVD proposaient la bande-annonce de notre film du jour, bande-annonce incroyable qui a dû faire fantasmer plus d'un fan du site Nanarland (dont je fais partie). Plus de 3 minutes de castagnes et de mobilier détruit agrémentées d'une voix off francophone mythique nous promettant un Wong Chen Lee "plus puissant que jamais" et "peut-être plus fort aujourd'hui que Bruce Lee hier" ! Une nana enlevée, la menace de "l'empire noir", un plan vaguement érotique, bref de la pure bande-annonce pour cinéma de quartier qui donne la bave aux lèvres quant au potentiel comique de la chose. Alors, nanar de compétition ou simple production sans saveur ? Pour avoir la réponse à cette question que le monde entier se pose, il faudra faire un effort et lire la suite de cet article juste en-dessous (ben oui, en français on écrit de haut en bas si vous aviez oublié...).

Perso, quand on me dit "cinéma hong kongais", je pense tout de suite à la Shaw Brothers et à Tsui Hark. Mais ceux-ci ne représentent évidemment qu'une petite partie de la production cinématographique de la région, et la plus qualitative aussi dans la catégorie "films de genre". Parce que, comme dans le vestimentaire, on faisait aussi dans le low-cost. Et un des fleurons de cette branche discount du cinéma HK était la société de production IFD qui, dans les années 80, s'est spécialisée dans les films de kung fu et de ninja destinés essentiellement à être exportés en Occident. La recette était mécanique et le rythme industriel : on achetait d'autres métrages asiatiques (polar ou action) et on y intégrait quelques scènes tournées maison en refaisant le montage et le doublage pour un résultat final parfois hilarant, parfois navrant, mais toujours incongru. Aux postes de réalisateurs, beaucoup de pseudonymes et souvent un nom (bien réel cette fois) qui revient : celui de Godfrey Ho, véritable stakhanoviste du bidouillage cinématographique et authentique Docteur Frankenstein du film de ninja chelou. Pour tout savoir sur le personnage, le site Nanarland est la référence française.

Ayant déjà vu du même margoulin Challenge The Ninja et Ninja Terminator qui se révèlent être de sympathiques nanars (sans être ultimes non plus), je me suis donc fait un plaisir de débourser l'euro symbolique pour acquérir la précieuse galette de L'exécuteur défie l'empire du kung fu. Hélas, c'est la douche froide ! Ça démarrait pourtant sur les chapeaux de roue avec une des scènes de karaté les plus ridicules jamais vue à base de moulinage de poignet et de plans en vue subjective, rendant la chose encore plus irrésistible (on peut aussi noter la bouillie blanche bizarroïde qui sort de la bouche des types mis KO). Le gros problème, c'est que les scènes comme celle-ci tournées par Godfrey Ho ne représentent mises bout à bout que maximum 4 minutes sur la totalité du métrage qui en fait grosso modo 90 ! Le reste est en fait constitué d'un film sud-coréen dont le titre original est Haegyeolsa. L'histoire est incompréhensible, le tripatouillage dans le montage et dans le doublage doivent y être pour beaucoup. S'y entrecroisent une guerre des gangs, une fille qui est enlevée et la menace de "l'empire noir" (ne me demandez pas ce que c'est). Il y a beaucoup de bagarres, les types s'obstinent à tout casser dans le décor et surjouent dès qu'il faut faire de l'humour, mais ce n'est ni ridicule ni passionnant. Heureusement qu'avec ses accents caricaturaux et ses intonations parfois étonnantes, le doublage français nous garde éveillés, d'autant que j'ai appris grâce à celui-ci que l'on servait du cassoulet dans les restaurants asiatiques !

En bref, L'exécuteur défie l'empire du kung fu est hilarant 4 minutes et anodin les 86 autres. A moins d'être un fana absolu de films de kung fu, vous pouvez économiser la piécette réclamée par votre EasyCash pour tenter votre chance sur un autre nanar potentiel.