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Erasure "Wild !" (1989)
Wild !, voilà un disque qui porte bien son nom. Il s'agit du quatrième album du duo britannique Erasure. Pour rappel, c'est l'ex-Depeche Mode Vince Clarke qui en est le fondateur en 1985, après l'aventure Yazoo (le temps de deux albums) et le projet écourté The Assembly (qui n'aura duré qu'un seul single). Il est accompagné d'Andy Bell au chant.
Le binôme fait depuis toujours l'objet d'un mépris assez incroyable en France. Pourtant, avant même d'exploser dans leur mère patrie, c'est chez nous et en Allemagne qu'ils ont eu leur premier gros succès avec le single Oh l'amour en 1986. Une anecdote qui montre bien la franchouillardise de notre marché du disque. Il a fallu que les mecs mettent deux mots de français dans la chanson pour que ça marche et ensuite, pfiou, disparus des ondes chez nous malgré la qualité grandissante de leur musique au fil des albums. A croire que leur pop est trop subtile, trop britannique, pas assez variétoche...
Si Clarke donnait des frissons avec ses synthés métalliques sur le Speak & Spell de Depeche Mode ou le Upstairs At Eric's de Yazoo, il a par la suite changé de matériel et ses claviers ont commencé à avoir des sons en plastique (qui ont tendance à très mal vieillir). C'est le gros reproche qu'on peut ainsi faire aux trois premiers albums d'Erasure jusque 1988. The Innocents, par exemple, a de bonnes chansons mais elles sont desservies par une production synthétique un peu datée (j'ai été moi-même rebuté à la première écoute). Heureusement, à partir de Wild !, le son devient plus fin. La production rend aux sonorités synthétiques leur lourdeur et leur aspect métallique pour notre plus grand bonheur auditif. A cette évolution sonore s'ajoute une certaine désinhibition, voire carrément un vent de folie dans l'écriture de certaines chansons. L'exemple le plus frappant est la plage Drama !, rouleau compresseur pop complément dingue (peut-être le single le plus fou du groupe), que ce soit dans sa composition ou dans son chant. Andy Bell s'en donne aussi à cœur joie sur les dynamiques Star, Brother And Sister ou 2.000 Miles. Une caractéristique d'Erasure est aussi son écriture influencée par des groupes des 60's ou 70's comme The Platters ou The Righteous Brothers. Sur Wild !, on le perçoit distinctement sur les plages How Many Times ? et You Surround Me (génial). Remplacez la production électronique par une orchestration des 60's et ça passe comme une lettre à la poste. Terminons enfin par l'énormissime Crown Of Thorns qui est le moment "expérimental" du disque, une vraie perle électro au texte étonnamment politique (sans être citée, on croit comprendre que Margaret Thatcher en prend pour son grade). La chanson prend des airs d'hymne avec le chant d'Andy Bell en écho sur un boucle synthétique minimaliste, du grand art.
Cet opus n'est peut-être pas parfait (la piste Blue Savannah est fadasse et La Gloria est insupportable) mais il offre de bien bons moments et prouve tout le potentiel créatif du duo (il aura survécu aux 80's, beaucoup d'autres n'ont pas eu cette chance). De plus, il marque le début d'une incroyable montée en puissance artistique sur quatre albums, cycle qui s'achèvera en 1995 avec LE chef d’œuvre du groupe, l'album Erasure qui est un classique absolu de la musique pop électronique.