ABBA "Super Trouper" (1980)

Tiens, voilà un souvenir de jeunesse. Quand j'étais gamin, le Super Trouper d'ABBA a bien tourné sur la vieille platine vinyle de mes parents. Mes goûts musicaux ont ensuite évolué et j'avoue avoir eu beaucoup de mal pendant longtemps avec ABBA. Je ne crois pas que ce soit tant à cause de leur musique que par l'obstination des médias à nous les vendre comme le groupe pop ultime (ils se sont un peu calmés depuis). Je trouvais ça too much et, avec le recul, je suis sûr que le groupe suédois lui-même doit trouver cette adoration exagérée. Disons qu'aujourd'hui je suis assez partagé. D'un coté, certaines de leurs chansons me passent clairement par les trous de nez (Dancing Queen ou Take A Chance On Me par exemple). Je leur trouve un coté, je sais pas... gnian-gnian (ça veut pas dire grand chose mais j'ai pas trouvé plus explicite). Mais d'un autre coté, je dois admettre que Benny Andersson et Björn Ulvaeus sont de sacrés arrangeurs et des singles comme Knowing Me, Knowing You ou Summer Night City sont hyper efficaces.

Sorti en 1980, Super Trouper est le septième et avant-dernier album du groupe. L'air de rien, ABBA n'aura eu qu'une courte carrière puisque l'aventure musicale a duré une dizaine d'années seulement. Pas de surprise, c'est de la pop ciselée qu'on retrouve sur la galette. Au programme dix plages avec des moments purement abbaesques et d'autres plus audacieux ou surprenants. Inutiles de vous dire lesquels je préfère. Dans tous les cas, on ne peut qu'apprécier les harmonies vocales parfaites d'Agnetha Fältskog et Anni-Frid Lyngstad qui transfigurent toutes les mélodies sur lesquelles elles se posent (comme sur Happy New Year par exemple). Ou plus encore sur Me And I, sans doute LE chef d'oeuvre de l'album avec son synthé, sa mélodie imparrable et ses arrangements vocaux qui donnent des frissons. Super Trouper, la chanson, est également bien foutue dans le genre même si je trouve que le "Supa-pa Troopa-pa" du refrain était dispensable. Bien qu'assez classique, Our Last Summer se démarque quand même par un joli solo de guitare qu'on n'attendrait pas forcément. La flûte de The Piper, on ne s'y attendait pas non plus, et pourtant ça fonctionne du tonnerre. Bon ben, l'air de rien, en me relisant, ce disque est pas si mal ! D'autant qu'on peut citer aussi On And On And On et Lay All Your Love On Me en tant que réussites. Le premier est ultra-énergique avec son esprit rock & roll tandis que le second est clairement orienté dance music avec un refrain génial sonnant comme un hymne.

Même si ça reste bien du ABBA, l'utilisation (parcimonieuse) des synthés et des effets de studios trahissent la discrète influence de la nouvelle scène pop qui pointait le bout de son nez (la fameuse new wave). Les mois qui allaient suivre marqueront le choc de deux générations : la pop des seventies incarnée entre autres par ABBA et un nouveau son pop incarné par des jeunots comme OMD, Depeche Mode ou encore Soft Cell... Déjà miné par des problèmes relationnels, le quatuor suèdois était en plus dans l'obligation de se renouveler pour ne pas être taxé de ringard. Ils préféreront dissoudre le groupe deux ans plus tard encore en pleine gloire.