Nightbeast (1982)
Qui a dit que le DVD était mort ? Certes, l'offre magasin n'est plus aussi pléthorique que dans les années fastes mais des éditeurs indépendants continuent de faire vivre le support. Comme Bach Films par exemple, toujours prêt à sortir de derrière les fagots des inédits plus ou moins oubliés. Dernière fournée en date : cinq séries B/Z des années 80 publiées sous le label The Aliens Collection. Nightbeast est l'une d'entre elles.
Pas besoin d'avoir passé le brevet des collèges pour comprendre l'histoire : après avoir heurté une météorite, un vaisseau extra-terrestre s'écrase au fin fond de la campagne américaine. Son pilote, un alien à l'appêtit aiguisé pour la chair humaine, en réchappe et une partie de chasse s'organise entre lui et la police locale.
J'aime toujours jeter un coup d'oeil sur la fiche IMDB des réalisateurs. Don Dohler a le même profil que Rick Sloane (rencontré lors de la chronique de Goblins) : un vrai passionné de séries B/Z (il était rédacteur pour un magazine local dédié au genre), sans grand talent certes, mais suffisament motivé pour mener ses projets à bien malgré des budgets rachitiques. Un truc marrant : sa modeste filmographie semble dédiée quasi-exclusivement aux attaques extra-terrestres ! A en croire, les commentaires, Nightbeast serait le fleuron de sa carrière, son blockbuster à lui monté pour la somme incroyable de 14 000 dollars selon la légende wikipediesque. Si les Oscar n'ont jamais parus à sa portée, Dohler pourra en tous cas se targuer d'être un découvreur de talent : c'est en effet grâce à lui que le futur réalisateur-producteur J.J. Abrams a eu sa première expérience cinématographique. Alors âgé d'une quinzaine d'années, ce dernier a signé une partie de la musique de Nightbeast !
Vous vous doutez qu'avec un budget pareil, il n'y aura pas de miracle. On est là face à une production qui transpire l'amateurisme de tous ses pores, même si le résultat n'est pas aussi ridicule qu'on pourrait l'imaginer. Ce qui est fou surtout, c'est que, quarante ans après sa sortie, cette bande continuent d'être éditée hors des frontières américaines (le fait qu'elle ait intégré le catalogue Troma a sans doute aidé). Ca doit faire halluciner en premier le casting, pour sa majorité non professionnel, qui n'aura sans doute jamais imaginé le statut semi-culte de cette peloche fauchée. Le spectacle fonctionne pourtant un minimum, à la condition que l'on soit adepte des effets spéciaux artisanaux, du montage parfois abrupt, de la photographie très "naturaliste" et de la direction des acteurs à limite de l'existence. Cette chasse à l'alien dans l'arrière-pays US est à la fois touchante par sa naïveté et son minimalisme, et en même temps généreuse avec fusillades à gogo, quelques effets gores cra-cra, le plan nénés de rigueur et un emprunt scénaristique indispensable aux Dents de la mer (tant qu'à faire !). Franchement, on ne s'ennuie pas durant ces 75 minutes d'approximation filmique.
A celà s'ajoute évidemment le look incroyable de son monstre. Caoutchouteux et craignos comme on les aime, mais qui a aussi contribué à la réputation du métrage. Comme quoi, c'est important une créature avec une bonne tronche (bien que statique), ça peut faire oublier pas mal de défauts. Le réalisateur semble conscient de ce fait puisqu'il l'expose sans honte dès les premières minutes, faisant fi de la fameuse règle de Roger Corman de ne dévoiler un monstre que progressivement pour faire monter le suspense (encore que lui faisait surtout ça pour limiter leur exposition au maximum tant il n'assumait pas toujours). Bref, Nightbeast est surtout fait pour les amateurs de séries Z et on ne remerciera jamais assez les petits éditeurs de nous les faire découvrir ou re-découvrir.