Les ailes d'Honneamise (1987)

Dans une époque alternative, la conquête de l'espace est en marche tandis que deux nations, le royaume d'Honneamise et "La République", sont sur le point de se faire la guerre. Shiro, une jeune pilote sans avenir, est engagé dans la Royal Space Force. Il est finalement choisi pour devenir le premier homme dans l'espace et il suit de ce fait un entrainement intensif, encouragé par Riquinni, une jeune femme très religieuse qu'il a rencontrée. Entre les problèmes techniques, la pression des militaires et les attentats de la nation ennemie, la préparation de ce premier lancement d'une fusée habitée ne sera pas de tout repos.

La genèse des Ailes d'Honneamise est intéressante. N'étant pas un expert en animation japonaise, j'ai découvert via le net qu'il s'agit de la toute première production du studio Gainax, parait-il très apprécié des amateurs. Ce qui est surtout surprenant, c'est que ce studio était à ses débuts constitués uniquement d'anciens camarades d'une même école. En bref, un vrai studio indépendant fondé par des passionnés et qui n'a rien trouvé de mieux pour se lancer que de réaliser un long métrage d'animation ambitieux de 120 minutes au budget maousse ! Techniquement, c'est du costaud. Le graphisme est hyper détaillé, l'univers visuel est fouillé et l'approche esthétique réaliste a clairement marqué l'animation japonaise. Je ne sais pas si beaucoup de films d'animation japonais sortis avant 1987 ont un tel niveau de détails mais, ce qui est sûr, c'est que la sortie de ce film a créé une vraie émulation artistique. Que ce soit Katsuhiro Otomo avec Akira, Mamoru Oshii avec ses Patlabor et même les studios Ghibli dans une certaine mesure, de nombreux auteurs se sont lancés dans ce but de faire plus ambitieux, plus détaillé, plus réaliste.

En surfant, j'ai constaté que Les ailes d'Honneamise était à plusieurs reprises qualifié de "chef d’œuvre". Il est vrai qu'au niveau purement technique, il enfonce n'importe quelle de nos productions hexagonales et que cette variation de L'étoffe des héros dans un présent alternatif rappelant le steampunk est vraiment originale. Je trouve cependant que ça coince au niveau de l'histoire qui manque légèrement de consistance et qui entame plusieurs thémes sans forcément aller au bout des idées, ce qui rend l'ensemble un peu bancal et pas toujours limpide. On y parle ainsi de politique (via la crise entre les deux nations voisines ou l'ingérence des militaires), de social (avec l'avis de la population concernant l'argent dépensé dans la conquête spatiale) et aussi de religion (via le personnage de Riquinni très caricatural dans ses propos il faut le dire) mais Les ailes d'Honneamise est avant tout la préparation d'une conquête spatiale. Un spectacle sincère et beau à regarder, une nouvelle preuve du savoir-faire technique japonais, mais avec un contenu un peu frustrant.

Et en parlant de frustration, j'ai revu ce film sur le DVD de la collection Manga Mania. L'image est d'une qualité médiocre mais le pire, c'est que le film a été coupé ! Il manque en effet une scène où Shiro est à deux doigts de violer Riquinni. Le pire, c'est que dans les bonus, il est question dans les notes de production de cette version coupée en disant que la version uncut est trouvable sur différents supports ! Encore plus grotesque : dans le commentaire audio, les intervenants échangent en visionnant la version intégrale si bien qu'on les entend commenter la fameuse scène... qui ne passe pas l'écran ! C'est à n'y rien comprendre puisque la version Manga Mania sortie en VHS dans les 90's était non coupée. Pour les fans absolus, sachez que le film est ressorti depuis chez un autre éditeur dans son montage intégral.

Les ailes d'Honneamise a fait un bide au box office japonais. Il faut dire que la structure et la narration sont plus proches d'un film d'auteur que d'un blockbuster. Ceci dit, plus d'un studio d'animation aurait rêvé de démarrer son activité avec une production aussi ambitieuse.