Joan Jett and the Blackhearts "I Love Rock'n Roll" (1981)

Si Joan Jett ne reste pour beaucoup de Français que l'interprète d'un seul tube (I Love Rock'n Roll), ce n'est pas le cas dans son pays les États-Unis où elle a un véritable statut d’icône de la musique. D'abord membre clé du mythique groupe de rock féminin les Runaways dans la seconde moitié des années 70 (pour quatre albums quand même), elle a su rebondir après l'explosion de la bande pour mener une carrière fructueuse en tant que leader de son nouveau groupe, les Blackhearts. Même si, apparemment, ça n'a pas été évident sur le coup, les maisons de disque jugeant son rock brut de décoffrage pas assez contemporain en comparaison avec les nouvelles sonorités sophistiquées de la new wave. Qu'importe, elle a créé son propre label et le public américain a immédiatement accroché. Autant dire que les majors s'en sont mordu les doigts...

Bref, l'album I Love Rock'n Roll est le deuxième de Joan Jett depuis la séparation des Runaways et c'est une sacrée galette ! C'est vrai que j'ai tendance à être assez sévère envers le rock américain que je trouve parfois trop formaté, pas assez audacieux par rapport à son homologue britannique. Mais dans le cas de Joan Jett, ce n'est pas un problème car elle compense un rock effectivement sans prétention par un très bon sens de la mélodie et, surtout, par un enthousiasme MO-NU-MEN-TAL ! Bon sang, elle a plus de testostérone dans la voix que les chanteurs de Muse et Coldplay réunis ! En tous cas, le titre du disque ne ment pas, on sent qu'elle aime ce rock à l'ancienne des 60's/70's sans artifice et elle envoie du lourd avec sa voix puissamment féminine au charme indéniable quand elle s'éraille (voir le vitaminé Victim Of Circumstance).

L'exercice de la reprise est tout un art et Joan est passée maîtresse en la matière car elle a toujours su apporter ce truc en plus qui transcende le matériau d'origine. Et c'est évidemment le cas ici avec pas moins de cinq "semi-classiques" du rock repassés à la moulinette post-punk, c'est-à-dire avec les puissances sonore et émotionnelle multipliées. Il y a forcément la chanson-titre, dont le coté plan-plan de la version originale des 70's a été mis de coté pour en faire le tube monstrueux qu'on connait. Mais il y a aussi Crimson And Clover qui est sublimé dans une production et une interprétation bien plus intense, et qui rend honneur à la poésie du texte. Sans oublier l'improbable, mais ultra-réussie, réinterprétation rock du chant de Noël Little Drummer Boy ! L'autre moitié du disque écrit par la chanteuse est tout aussi cool et respectueux des codes de ce rock old-school joué avec un son du début des 80's (avec un gros coup de coeur pour Be Straight et son refrain imparable). Le disque est court (30 minutes et pas une de plus !) mais le voyage en vaut carrément la chandelle et j'ai hâte de découvrir d'autres albums de la rockeuse qui, malgré le succés commercial, est toujours restée fidèle à la musique de son coeur sans se soucier des modes.