Cocteau Twins "Victorialand" (1986)

Voilà le quatrième album de Cocteau Twins. Si Treasure, le génial précédent opus de 1984, était envoûtant, Victorialand est définitivement onirique. Le duo Liz Fraser / Robin Guthrie (le troisième larron Simon Raymonde étant occupé sur un autre projet) continue en effet son processus d'épuration de ses sonorités en mettant plus que jamais en avant une guitare aérienne au reverb monstrueux et en éliminant toute batterie ou boite à rythme (à l'exception de la plage Little Spacey). Il en résulte un rock atmosphérique, planant, magnifié par la voix angélique de la chanteuse interprétant des textes incompréhensibles (elle l'assume totalement) mais auditivement fascinants.

Victorialand est un album cohérent. Ses neuf plages forment un tout, une sorte d'odyssée dans l'univers des rêves (la pochette ultra-classe est à ce titre parfaitement appropriée). Hormis la plage d'introduction de six minutes (Lazy Calm, jolie pièce d'ambient avec son saxo), les autres titres ne dépassent jamais les quatre minutes et sont chacun un petit exercice de style qui offre de bien beaux moments : Throughout The Dark Months Of April And May tutoie le style religieux (du genre a être chanté dans les églises gothiques), Fleet-Like Fins a une petit coté world music avec son tabla (une percussion indienne) et The Thinner The Air, la plage de conclusion, donne la chair de poule avec sa ligne de clavier baroque sur laquelle se pose le chant aux faux air d'opéra de Liz Fraser. C'est beau, c'est même presque fascinant, mais c'est aussi court puisque la galette dure à peine 33 minutes ! En tous cas, la production est vraiment bonne avec ce son de guitare unique qui est magnifié par un mixage au petits oignons.

Par contre, les rédacteurs de Wikipedia délirent complétement. Dans la colonne "Genre", on lit "dream pop", "ethereal wave", "ambient pop"... C'est quoi ce truc à vouloir tout sous-catégoriser, ça ne veut absolument rien dire et je trouve ces intitulés grotesques (leurs définitions sont tellement floues qu'ils ont dû en mettre trois). Cet album, c'est du rock, point barre ! On peut lui coller des adjectifs (je ne me suis pas gêné dans le paragraphe précédent) mais de là à un faire un genre musical à part entière, faut pas abuser, même s'il est vrai que le groupe écossais a développé un son personnel qui sera imité par la suite (sans jamais vraiment être égalé).