Le Bounty (1984)

Ce que j'aime dans le cinéma, c'est qu'il peut faire voyager et découvrir des épisodes fascinants de l'Histoire. C'est en tous cas grâce à notre film du jour que j'ai découvert celui de la mutinerie du Bounty et tout son contexte humain et historique. L'année de l'événement est simple à retenir pour les Français : 1789. Deux ans auparavant, le navire Bounty avait quitté l'Angleterre à destination de Tahiti pour collecter des arbres à pain et ensuite les livrer aux Indes britanniques afin de nourrir les esclaves. Son capitaine William Bligh (joué par Anthony Hopkins) fut décrit comme un homme expérimenté, mais bien peu psychologue. Après une tentative ratée de passer par l'est, il se résolut à passer par l'ouest et atteignit finalement Tahiti où lui est son équipage passèrent pas moins de cinq mois. Le soleil, les plages de sable fin et le charme des femmes de la région eurent raison du moral de l'équipage qui eu bien du mal à repartir vers les matins brumeux et froids de l'Angleterre. Et le caractère colérique et intolérant de Bligh n'arrangea pas les choses si bien que le second capitaine Fletcher Christian (joué par Mel Gibson), aidé d'une grosse moitié de l'équipage, prit le contrôle du navire par la force et balança Bligh et ses soutiens dans une chaloupe avec quelques vivres et une boussole ! Le plus fort, c'est que ces dernier ont survécu et rejoint le terre ferme ! Fletcher Christian et sa clique n'avait plus qu'une idée en tête : retourner vers leur paradis, trouver des femmes et se planquer discrètement sur une île...

L'histoire est géniale et le cinéma s'en est vite emparé. Avant 1984, quatre longs métrages lui avaient déjà été dédiés : The Mutiny Of The Bounty en 1916, In The Wake Of The Bounty en 1933 (avec Errol Flynn), Les révoltés du Bounty en 1935 (avec Clark Gable) et enfin son remake du même titre en 1962 (avec Marlon Brando). C'est sous l'impulsion du maître des grandes épopées David Lean (Le pont de la rivière Kwai, Lawrence d'Arabie, Le Docteur Jivago...) que cette nouvelle version a été lancée à la fin des 70's avec la collaboration du nabab Dino de Laurentiis. Les ambitions initiales furent grandes puisque la saga devait prendre la forme de deux long métrages et la production démarra réellement puisqu'une réplique du Bounty fut rapidement mise en chantier. Mais le projet, sans doute trop ambitieux, capota visiblement pour des questions de budget. Ceci dit, Dino de Laurentiis avait déjà mis des billes dans le projet et, fort du bateau déjà construit, le célèbre producteur a relancé la machine pour finalement confier le bébé au réalisateur australien peu connu Roger Donaldson qui avait refusé de diriger Conan le destructeur peu avant.

Et le résultat est pour le moins soigné. Déjà, l'intro donne des frissons avec la musique géniale de Vangelis qui démarre avant même l'apparition du lion de la MGM. Le spectateur est ensuite rapidement plongé dans cette fin du XVIIIe siècle avec les costumes évidemment, mais surtout grâce cette réplique du Bounty fendant les flots. Les superbes décors naturels des îles sont également bien mis en valeur et on se met rapidement à la places marins qui ont préféré rester à Tahiti plutôt que de trimer sur le navire (le film montre assez bien la différence de vie à bord entre eux et les gradés). Coté casting, Anthony Hopkins excelle et on a le plaisir de retrouver aussi Daniel Day-Lewis et Liam Neeson. Bref, des moyens humains et financiers ont été mis et ça se voit à l'écran.

Ceci étant dit, aussi appliquée soit-elle, la réalisation de Roger Donaldson reste très académique. Il faut dire que le reste de sa filmographie, comprenant notamment Cocktail, La mutante ou Le Pic de Dante, montre qu'on n'est pas au même niveau que David Lean... De plus, même si les capitaux de cette production sont en grosse partie britanniques, son traitement scénaristique n'échappe pas au style hollywoodien, notamment via la figure de Fletcher Christian dépeint sous certains aspects comme une sorte de héros romantique puisque, à en croire Wikipedia, le vrai personnage a enlevé des femmes tahitiennes, là où le personnage du film se les voit offrir par les monarque des lieux... Mel Gibson avouera plus tard en interview ne pas être satisfait de son personnage qui, semble-t-il, est bien plus intégre et droit à l'écran que ne fut son homologue dans la vie réelle. Ca n'empêche pas ce film d'être très agréable avec une belle montée en tension des psychologies.

Si le film s'arrête à l'arrivée des mutins sur l'île déserte de Pitcairn où ils s'installeront, l'histoire des vrais révoltés ne s'est pas arrêtée là et ce qui s'est passé sur cette île dans les années qui suivirent aurait pu faire une suite cinématographique intéressante tant les événements ont pris une tournure incroyable et triste à la fois (en gros, la petite communauté a fini par s'entre-tuer !).