Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
VHS-1980
Publicité
VHS-1980
Derniers commentaires
17 août 2022

RoboCop (1987)

Robocop - Affiche

 

L'histoire, vous la connaissez : dans un Detroit futuriste rongé par la criminalité, l'officier de police Alex Murphy est envoyé au casse-pipe et meurt lors d'une intervention. L'OCP, un conglomérat militaro-industriel, récupère son corps et l'utilise pour élaborer un prototype de policier robotique appelé RoboCop. Mais la conscience de Murphy n'a pu être totalement effacée et il va vouloir retrouver ses assassins.

Comme évoqué dans l'article consacré à La chair et le sang, la carrière du réalisateur Paul Verhoeven semblait compromise au milieu des années 80 sur ses terres néerlandaises natales. Jugé trop radical et provocateur, son cinéma peinait à trouver des financements. Aussi, décision fut prise de tenter l'aventure américaine, au démarrage assez décourageante selon les aveux mêmes de l'intéressé qui jugeait les scripts proposés tous plus mauvais les uns que les autres. Même le scénario de RoboCop s'est retrouvé à la corbeille jusqu'à ce que son épouse l'invite à y jeter un second coup d’œil, convaincue qu'il y avait un vrai potentiel. Bien vu ! RoboCop deviendra finalement le premier film 100% hollywoodien de Paul Verhoeven lui permettant de prouver au passage qu'il pouvait à la fois répondre aux attentes narratives et visuelles du cinéma commercial américain (action et effets spéciaux pour le box office) tout en gardant son intégrité artistique et son œil européen via la tonalité satirique et l'ironie mordante de cette histoire qui, au final, parle bien plus des dérives du libéralisme que des exploits d'un robot-flic.

 

Robocop - Capture 1

 

On ne peut néanmoins pas nier que, du coté purement technique et narratif, c'est sacrément bien emballé ! C'était la première fois que le metteur en scène s'attaquait à la science-fiction et il a sacrément assuré au point que de nombreuses scènes sont devenues cultes. La photographie est magnifique et la réalisation de Verhoeven est puissante, millimétrée et audacieuse en même temps, entremêlant parfaitement les registres : de l'action (fusillades à gogo) au drame (la séquence de la maison vide) en passant par l'humour acide (la scène des sanitaires), sans oublier des incursions surprenantes dans l'horreur pure (la main arrachée ou le mec en train de fondre !). Comme pour Terminator, le même script tourné par un tâcheron n'aurait donné qu'une vulgaire série B mais la caméra de Verhoeven donne une véritable ampleur au spectacle (un exemple tout bête : l'arrivée de RoboCop dans le commissariat avec la caméra à l'épaule courant avec les officiers dans le couloir). Évidemment, on ne peut omettre les rôles importants qu'ont eus les spécialistes des effets spéciaux Rob Bottin et Phil Tippett qui ont aussi grandement contribué à l'imagerie mythique de ce film. Le premier pour le look carrément iconique du RoboCop et le maquillage incroyable de Peter Weller quand il retire son casque (je me demande encore comment c'est possible). Le second pour ses séquences du robot ED-209 en stop motion carrément délirantes. Les deux réunis, c'est le top de ce qui se faisait en terme d'effets spéciaux pré-numériques. Ajoutez aux images la musique orchestrale très inspirée et évocatrice de Basil Poledouris et vous obtenez un film qui n'a rien perdu de son impact (35 ans après, la scène du meurtre de Murphy est toujours aussi traumatisante).

Ça, c'était pour la forme. Le fond, lui, est tout aussi costaud ! Ce n'est peut-être pas l'aspect auquel on est le plus sensible quand on le regarde jeune mais, avec le recul et la compréhension, on se rend compte que l'aspect politique du script est assez rageur, malgré l'ironie qui l'entoure. Il faut se rappeler que l'Européen Paul Verhoeven ne s'est installé aux États-Unis que depuis peu de temps et RoboCop traduit bien cette vision que pouvait avoir un étranger du système ultra-libéral américain où le mélange des genres se fait sans la moindre honte (système qui a depuis contaminé bon nombre d'autres pays). L'histoire est censée se passer dans le futur mais elle exagère à peine une réalité où le monde des affaires et de la politique se confondent au point de savoir qui des deux est l'auteur de certaines lois, et où des méga-entreprises privées ont finalement plus de pouvoir que les gouvernements car, justement, tout ou presque a été privatisé ! Les cadres supérieurs de ces sociétés sont décrits comme des requins qui se tirent dans les pattes et placent leur réussite sociale et financière au-dessus du respect de l'individu (on ne parle pas de la drogue et de la prostitution qui gravitent autour). Certains trouveront les ficelles un peu grosses, mais le coté satirique est ostensiblement assumé via des séquences et répliques assez savoureuses (voir comment ils parlent de leur pauvre collègue qui meurt accidentellement pendant la démonstration de l'ED-209). Le réalisateur en profite aussi pour se moquer de la télévision, que ce soit via cet ancêtre de Cyril Hanouna ("J'en voudrais pour un dollar !") ou ces flashes hilarants où l'information se mélange à l'entertainment et à la publicité, pour le plus grand malheur du cerveau des téléspectateurs.

 

Robocop - Capture 2

 

Bref, tout ça pour dire que RoboCop mérite clairement son statut de classique. Encore aujourd'hui, il n'est sans doute pas à mettre devant tous les yeux à cause de sa violence graphique (âmes sensibles s'abstenir), mais ça reste toujours aussi percutant d'un point de vue artistique. Comme Terminator, son succès va engendrer une exploitation sur tous les supports mais on va s'en tenir aux séquelles cinématographiques. Peter Weller retrouvera en effet l'armure de son personnage en 1990 pour RoboCop 2 dirigé par un Irvin Kershner démotivé (on lui doit L'empire contre-attaque pourtant). Exit le relatif réalisme des origines, on bascule ici dans une outrance digne d'un comic book. Je sais qu'il a ses défenseurs mais je le trouve personnellement plat, bancal et sans finesse. Pourtant, cette suite passerait presque pour une réussite à coté de RoboCop 3 sorti en 1993, grosse série B aux effets spéciaux catastrophiques et au héros ridiculisé du début à la fin (on lui fait même conduire une Cadillac rose !). Heureusement, les dégâts s'arrêtèrent là au cinéma jusqu'à ce que des mecs, inconscients ou prétentieux, décidèrent de produire en 2014 un remake sobrement intitulé RoboCop pour un résultat d'une fadeur et d'une laideur désespérantes ! Finalement, si vous voulez prolonger l'expérience au cinéma, je ne peux que vous conseiller Le colosse de New York, une modeste production un peu oubliée de 1958 signée Eugène Lourié (Gorgo forever !) qui a, j'en suis sûr, inspiré les scénaristes du film de Paul Verhoeven. C'est l'histoire d'un scientifique décédé dont le cerveau est implanté dans un robot. C'est visuellement sobre mais ce film SF a une atmosphère spéciale qui le rend à la fois touchant et dérangeant.

Publicité
Publicité
Commentaires
S
Super film, culte effectivement et plus profond qu'il n'y paraît comme toujours chez Verhoeven
Répondre
T
Un film culte, assurément, même si ce n'est pas mon préféré de Paul Verhoeven, qui reste Starship Troopers.
Répondre
Publicité